Aperçu | Battleplan

Qu’il est bon de voir fleurir des projets originaux, d’autant plus dans un genre moins propice à l’innovation comme le wargame. Battleplan, le prochain STR de Slitherine, entre dans cette catégorie et c’est donc avec une grande curiosité que je me suis penché sur sa démo.

Battleplan vise en effet à combler le vide existant dans l’univers du wargame opérationnel, où seuls une poignée de titres résident. On possède une pléthore d’excellents wargames stratégiques, tout autant sinon plus de pépites tactiques, mais au niveau de l’opérationnel, la sélection reste chiche et tourne autour des mêmes jeux. Bonne nouvelle, le peu que j’en ai vu se révèle prometteur bien qu’un gros coup de polish soit nécessaire à ce stade du développement.

La plume plutôt que l’épée

Dans Battleplan, vous jouez le rôle d’un général de la seconde guerre mondiale qui communique à grands coups de crayon les directives pour le front. Vous visualisez ces tableaux de briefings militaires agrémentés de flèches et de cercles gribouillés ? Et bien c’est ça Battleplan, mais en temps réel (pausable, j’y tiens) et sur d’immenses cartes géographiques respectueuses de l’époque et dotées d’un zoom puissant. Vos officiers se chargeront ensuite de respecter vos consignes de façon autonome. La démo testée proposait, en sus des 2 tutoriels, la bataille de Cherbourg en juin 44 puis celle de Caen, qui se déroulent chacune sur plusieurs semaines. L’échelle maintenant posée, nous pouvons entrer dans le vif du sujet.

Armée sur mesure pour wargame intuitif

La première phase de la mission consiste à former votre ordre de bataille du haut jusqu’au bas de la chaîne de commandement. On y affecte des divisions, on y recrute des groupes supplémentaires (de la division à l’escouade) puis on lie à notre guise les officiers et les différents groupes hiérarchiques. Je ne m’étends pas sur le sujet car malheureusement ce volet optionnel fonctionne mal sur la version actuelle (le jeu intègre par défaut une structure jouable), mais il plaira aux joueurs qui aiment constituer avec précision leur armée. Il sera cependant un point clé de votre stratégie car l’échelle ne permet pas de contrôle direct où une éventuelle dextérité à la souris compenserait une mauvaise préparation.

Une fois les troupes placées vient l’heure de dévoiler vos talents de dessinateur. Aidé par une fenêtre d’ordres plutôt complète, vous dessinez à la mano les trajectoires et les zones d’action pour chaque groupe. Concevez un plan à la hauteur de vos ambitions, du simple ordre de rassemblement à l’assaut complexe interarmes en plusieurs étapes. Commencez par un barrage d’artillerie sur cette zone X avant de la contester avec votre infanterie que vous diviserez pour l’occasion. Pendant ce temps les blindés arrivent avec pour objectif de fragiliser la même zone et de percer jusqu’à la ville derrière, qu’un second peloton rejoindra depuis un autre axe. Le groupe voisin se contentera pour sa part de tenir la ligne afin d’éviter une avancée de l’ennemi, qui pourrait ensuite refermer une poche derrière vos assaillants. L’outil de planification se révèle puissant et intuitif, un vrai régal pour préparer avec précision les prochaines journées de bataille. Un fâcheux imprévu ? Une actualisation de votre plan reste possible une fois par jour pour y répondre. Quant à la liberté stratégique, elle est bien présente. Pour rester sur l’exemple de la bataille de Cherbourg en capture ci-dessous, que feriez-vous pour atteindre et libérer la ville ?

Battleplan for logistics

Échelle opérationnelle oblige, la logistique siège au centre de vos préoccupations. Plusieurs sites de ravitaillement existent et reçoivent une quantité X de ressources sur un temps donné (qui regroupent ensemble le carburant, les munitions et les rations). Ces dernières transitent par les routes pour alimenter les unités et les dépôts secondaires placés par vos soins (prévus entre autres pour accélérer la vitesse du ravitaillement, un critère d’une grande importance). Dans Battleplan, toute unité au repos consomme en permanence des ressources. Suffisamment pour réfléchir à la logistique, mais pas assez pour vider vos réserves. En revanche, toute unité en mouvement ou pire, en combat, draine considérablement votre stock. La consommation à l’heure est précise à la centaine de kilos près pour chaque unité, ce qui permet de gérer le transit matériel et l’activité des troupes. Et pour savoir quand pousser un assaut et quand se retirer du front. En cas de ravitaillement insuffisant, faute de réserves ou en raison d’un éloignement trop important, les troupes perdront en efficacité, subiront de l’attrition puis finiront par se rendre ou par disparaître. Le système de jeu est diablement bien rendu et toute percée non consolidée peut vite se transformer en statistiques funestes. À l’inverse, sous réserve de posséder un dépôt plein à proximité, vous résisterez peut-être suffisamment longtemps à un encerclement avant l’arrivée des renforts. Mais avec l’option goutte sur le front qui descend à mesure que la jauge de réserve chute. De ce postulat découle un plan évident : préserver sa logistique et taper dans celle de l’ennemi. Plus que jamais. Ouvrir les routes et libérer les villes qui présentent un intérêt, établir des fortifications et des lignes défensives près des zones sensibles, percer à travers une route importante pour l’ennemi (qui empruntera un itinéraire à rallonge pour ravitailler le front) et capturer ses dépôts. Sur une carte géographique détaillée de la sorte, ni trop ni pas assez, ce casse-tête se transforme en véritable plaisir et nous immerge avec brio dans notre rôle distant.

C’est que l’ensemble se révèle dynamique, avec ce territoire qui se grignote de façon organique et non par cases. La ligne de front évolue sans cesse, des poches se créent et les jours de conflit s’engloutissent sans peine. En bon wargame, Battleplan tient compte des caractéristiques du terrain et des troupes, ou des contraintes de la nuit, et propose sur le papier un défi intéressant. Sur le papier car je n’ai pour l’instant pas compris grand chose au système de jeu, qui ne semble pourtant pas si complexe. Il me faudra une version plus aboutie et plus d’expérience pour saisir ses subtilités, utiliser les différents ordres avec efficacité et faire mieux que les piètres notes obtenues en fin de mission malgré des victoires précipitées. Mais au fond, vaut-il mieux une victoire rapide ou une plus longue mais moins coûteuse en hommes, chers généraux ? Blague à part, Battleplan semble prendre la voie du jeu “Facile à apprendre mais difficile à maîtriser”, un principe rare dans l’univers du wargame souvent riche en règles alambiquées.

Je n’ai pas non plus compris l’intérêt des modèles 3D qui laissent à désirer et distraient -voire surchargent- plus qu’ils ne servent. Battleplan se montre plus thématique qu’espéré et n’a pas besoin de ce genre d’artifices. Enfin, je reconnais aussi un côté frustrant à voir nos troupes s’agiter près d’un canon ennemi sans pouvoir leur demander de l’attaquer. Nous sommes des spectateurs à la merci des officiers IA, qui se débrouillent bien et possèdent des traits de caractère à prendre en compte, mais n’agissent pas toujours comme nous le ferions. Que voulez-vous, l’absence de micro gestion fait partie du concept ! Je ressors quand même plus curieux qu’avant et désireux d’explorer Battleplan, bien que je me questionne sur la capacité d’un tel système à tenir en haleine sur la durée. L’avenir nous le dira mais ce serait fort dommage d’y répondre à la négative, puisque ce concept doit être facilement portable sur d’autres conflits (voire ères) et donc maintenu dans le temps avec facilité.

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