Panzer Corps 2 inaugure sa nouvelle série de DLC, intitulée War Stories, avec pour premier épisode la chute de la Pologne en 1939 sous le prisme de cette dernière plutôt que côté Allemand. Si ce module original a su éveiller ma curiosité, il expérimente avec plus ou moins de succès les façons de dépeindre un tel conflit.
Panzer Surprise
1er septembre 1939. L’Allemagne de Adolf Hitler envahit la Pologne par le Nord, le Sud et l’Ouest du pays. En moins de 1 mois, le pays capitule face à cet assaut éclair d’une intensité sans égal, réitéré par la suite chez les nations voisines. Un morceau d’histoire que nous connaissons tous dans les grandes lignes, que Fall Of Poland retrace plus en détail depuis la perspective du défenseur. À travers 14 missions, de la charge de Krojanty jusqu’à Cernauti, les développeurs ont cherché à instaurer ce sentiment d’incertitude et de détresse vécu par les Polonais, de l’armée avec ses Uhlans jusqu’aux civils impliqués malgré eux.
Et c’est réussi. Permettez-moi de divulguer un spoiler vieux de 85 ans : vous allez perdre. Et oui, désolé si je vous l’apprends mais c’est ainsi. Les Allemands sont plus forts, fait avéré, et vos chevaux agiront en élégants dos d’ânes pour leurs Panzers. Malheureusement, ce n’était à l’époque pas une évidence pour les Polonais qui vont chercher à se battre et Fall Of Poland vous réserve des batailles au rapport de force délirant qui mettent à mal la psyché du joueur.
Dur dur…
Cette incertitude, ces dilemmes envoyés aux joueurs face à un tel défi instaurent une ambiance aussi terrible que réussie, des briefings jusqu’aux batailles. Vous avez des objectifs, réussirez-vous à les atteindre ? En ce sens, cela rend Fall Of Poland intéressant pour sa tâche première : explorer le point de vue Polonais. Vous y vivrez des situations délicates comme des encerclements surprises, des missions de défenses à l’infime espoir de réussite et des sauvetages de cerveaux civils en fuite à travers le pays….
Comment ce résultat est-il rendu en jeu ? De façon maladroite, où l’on se retrouve à affronter des probabilités en notre (grande) défaveur, et ce de façon totalement optionnelle. Sur les quatre premières missions, le jeu nous donne des ordres historiques comme le sauvetage de soldats ou la défense d’une ville, mais la tâche est tellement difficile que le joueur est également invité à abandonner la bataille en démantelant son QG ou en fuyant par un coin de la carte. Et ce dès le premier tour. En vénérable cyber stratège on essaye, forcément. Puis on perd, certainement. Si vous abandonnez, même dès le début, vous êtes victorieux. Mais si vous combattez et ne réussissez pas la mission dans le temps imparti, vous perdez. Situation étrange et selon moi mal amenée par les développeurs, qui instille une mauvaise première impression.
Le plus gênant, c’est que parmi les nombreux ordres et conditions de victoire ou de défaite, on ne sait pas ce qui compte vraiment et ce qui sert d’enrobage. Sur la première mission, un des objectifs principaux n’est pas réalisable. Sur la seconde, c’est la mission elle-même qui ne l’est pas. On ne connait pas non plus les récompenses ni les malus des différentes options, rendant toute planification de la campagne impossible. À vrai dire, on ne comprend même pas certains objectifs principaux… On se retrouve donc à chasser des objectifs à la fois terriblement difficiles et peu clairs, et à apprendre sur le tas si ça en valait la peine ou non. Est-il préférable de fuir avec ses unités et ses finances en bonne santé, ou continuer au risque de perdre ses troupes évoluées dans cette épreuve d’endurance ingrate pour éventuellement gagner une poignée de points de prestige sinon la gloire ? Très frustrant.
Après vérification, il est bien possible de gagner la majorité des missions par l’épée, seulement une telle réussite demande une excellente connaissance des règles du jeu et peut-être un peu de chance aussi. Si Panzer Corps revêt par moment des airs de pierre papier ciseaux, Fall Of Poland grossit ce trait pour nous servir des puzzle serrés plus que des missions nécessitant une réflexion stratégique organique. Deux lots de consolation : le jeu autorise dorénavant la désactivation de la limite de tours et dans l’ensemble la campagne et ses batailles restent sympathiques à découvrir, quitte à jouer en facile si besoin.
Quand le simulateur de défaite redevient wargame
La suite de la campagne ressemble davantage à un wargame traditionnel, avec des batailles à la difficulté plus raisonnable qu’il faudra obligatoirement gagner pour continuer la partie. De brèves victoires qui chauffent aussi bien le cœur de nos wojskas que celui du joueur devant son PC. Vous n’échapperez pas ensuite à de nouvelles fessées ni au sort historique réservé à la Pologne, mais si vous aimez le système de jeu de Panzer Corps, le DLC devient nettement plus appréciable et rassurant, loin de la punition du début. Enfin, c’est vite dit. Personnellement ce n’est plus ma tasse de thé et connaissant mal le système de ce jeu bien codifié, Fall Of Poland m’est trop difficile pour que je m’y amuse dessus. Non, si l’on reste sur le catalogue Slitherine, je préfère cogiter sur le fabuleux Decisive Campaigns : Ardennes Offensive, qui frise la perfection tant dans son ambiance que dans sa simulation engageante et bien plus crédible. Je m’abstiendrai donc de juger plus en détail le jeu, dont je ne suis à l’évidence plus le public.
Modifications du système Panzer Corps
Reprenant les bases de Panzer Corps 2, Fall of Poland apporte son lot de modifications, comme la suppression des unités alliées contrôlées par l’ia, la réduction maximale des unités auxiliaires, et la possibilité de faire évoluer toutes vos unités le long de la campagne.
Le système de personnages a également été revu. Ces derniers quittent désormais les briefings pour rejoindre le champ de bataille sous forme de héros attachés à une unité. Ils peuvent donc mourir, avec pour seul risque de continuer, sauf exception, la campagne sans eux. Vous y perdrez leur bonus tactique, regrettable, ainsi que leur arc narratif, dispensable.
Conclusion
Avec un premier tiers à l’exécution maladroite, Fall Of Poland se révèle clivant dès les premiers instants de jeu. Difficile et peu clair dans ses intentions, il ne sera apprécié sur le plan stratégique que par les fans de la série maîtrisant ses mécaniques et recherchant du défi. Les autres joueurs en sortiront frustrés face à ce simulateur de défaite où ils devront paradoxalement abandonner pour gagner, afin de rejoindre la seconde partie d’une campagne qui s’améliore enfin tout en restant exigeante. Son ambiance le rend cependant intéressant pour qui souhaite découvrir de façon ludique, sous réserve d’apprécier et de bien connaître le système de jeu de Panzer Corps 2, le triste sort de la Pologne. Pour une dizaine d’euros seulement, de nombreuses heures de jeu et de belles situations leurs seront réservées.
Intrigué par Fall Of Poland ? Sa page steam ici. Malgré la difficulté de ce DLC, Panzer Corps reste une bonne entrée en matière pour débuter le wargame sur PC.