Test | No Retreat! The Russian Front

No Retreat! The Russian Front rejoint les rangs de steam avec une adaptation PC signée Avalon Digital. Une aubaine pour les amateurs de ce célèbre wargame sur table de Victory Point et GMT, mais aussi pour les joueurs souhaitant découvrir le genre en douceur avec une formule éprouvée. Le jeu se présente cependant sous le statut d’accès anticipé. Et il mérite encore, après bientôt 3 mois de travail, une surcouche de corrections diverses qui m’incitent pour l’instant à vous recommander ce titre avec une certaine prudence.

De Barbarossa à Berlin

No Retreat! The Russian Front simule à l’échelle stratégique le front Est de la seconde guerre mondiale. Aux commandes des forces de l’Axe ou des Soviétiques, les joueurs peuvent s’affronter sur de courts scénarios -représentant chacun une opération- ou la campagne complète de 1941 à 1945 qui se déroule sur 28 tours. La spécificité de No Retreat : une expérience traditionnelle de complexité modérée, et plutôt intuitive, à laquelle se mélange un jeu de cartes et de jetons pour influencer les tours et les combats. Ajoutez-y un faible nombre d’unités, une carte petite à raison de 100km/hexagone et vous obtenez un cocktail intéressant pour des parties stratégiques rythmées et relativement courtes.

Dans No Retreat! chaque tour se divise en phases distinctes. Après le tirage des cartes à utiliser ce tour, le joueur de l’Axe procède aux étapes d’organisation (amélioration de troupes, voyages en train, déploiement des renforts…), de mouvement, de combat puis de ravitaillement, avant de laisser la main au joueur soviétique qui fera de même. Jeu d’histoire oblige, les tours s’accompagnent de conditions et de renforts calibrés pour offrir une expérience cohérente avec le déroulé historique et faire ressentir aux joueurs les difficultés rencontrées par les deux camps. C’est chouette et engageant sans virer dans la frustration, tout en laissant une certaine liberté aux joueurs qui pourront remporter la partie avant mai 1945 et de différentes façons.

Ce qui me plaît aussi, c’est que le jeu se prête bien à l’apprentissage des bases du wargame. On retrouve les zones de contrôle, les lignes -simples- de ravitaillement, les effets du terrain ou de la météo et les tables de combat, qui offrent une liberté stratégique appréciable sans submerger le joueur de complexifications. Le jeu se permet en outre quelques mécaniques exotiques, comme l’intéressante possibilité de contre-attaquer. Par exemple, lorsque votre adversaire attaque un de vos empilements, vous pouvez dépenser vos précieuses ressources pour contre-attaquer avec un empilement adjacent disponible. Diverti, l’ennemi se retrouve contraint de réduire les forces attaquantes pour contenir votre assaut « surprise ». C’est simple, dynamique, mais très bien pensé. Quant à la présence de cartes, elle ajoute certes une dose supplémentaire de hasard (on lance déjà un dé à chaque combat) mais ce chaos, cette zone de flou, apporte du piment aux tours et renouvelle les situations. Bref, No Retreat! The Russian Front est une valeur sûre et l’on comprend son statut de classique. Je me réjouis donc de son arrivée sur PC et vous invite, lecteur débutant ou à la recherche d’un wargame élégant, à vous intéresser à lui (puis à lire mon guide Débuter dans le wargame sur PC)

Quid de No Retreat version numérique ?

Passé au format numérique avec règles automatisées, le jeu gagne encore en accessibilité. Fini de feuilleter le bouquin de règles, on enchaîne les tours de façon naturelle sans possibilité de sortir du système de jeu. J’apprécie en outre l’infobulle qui traduit la symbologie OTAN utilisée sur les pions, fort pratique pour les débutants, ou encore le code couleur pour différencier les assauts planifiés. La version PC réduit également le temps des parties, seul contre soi-même, l’ia ou un ami. Un scénario se terminera en 30 à 90 minutes et la campagne vous occupera près de 7h. Concernant cette chère intelligence artificielle, elle se situe dans la moyenne du jeu de stratégie. Ni trop bête ni ingénieuse, gênante en défense mais moins efficace en attaque, bien que capable de sortir des coups surprenants. Plutôt facile pour un habitué, elle offrira un défi convenable et son lot de sueurs froides aux joueurs moins expérimentés. Enfin, la bande-son variée -et selon moi réussie- accompagne à merveille la partie. Le joueur soviétique se sentira pousser des ailes quand démarreront les chœurs de l’armée rouge !

Malheureusement, l’interface s’avère perfectible, voire par moment pénible. Déplacer une unité demande un clic puis un glisser déposer. Déterminer les assaillants d’une attaque nécessite une ribambelle de clics et de doubles clics. Pour fermer une fenêtre il faut parfois cliquer sur le plateau de jeu, parfois sur une icône, parfois… bref, sans devenir handicapante l’interface manque de souplesse et d’intuitivité. Le plus gênant, c’est que tout cet ensemble subit une latence importante qui complexifie la moindre tâche et génère parfois des erreurs de manipulation. On clique, on attend, et ce des dizaines de fois par tour. Je regrette en sus l’impossibilité de sauvegarder notre partie manuellement, ou d’annuler une action que l’on regrette aussitôt (seuls les mouvements laissent cette possibilité). Enfin, aussi bégnines soient-elles, de nombreuses fautes de frappe et d’orthographe se montrent au cours de la partie. Le jeu est encore en accès anticipé, statut prévu pour corriger ces soucis et les quelques errances de l’ia, mais il reste du travail sur la finition, l’ergonomie et la réactivité. L’adaptation joue donc les équilibristes entre ses qualités ludiques indéniables et ses lacunes techniques que l’on espère temporaires. Vous saurez mieux que moi de quel côté elle basculera pour vous.

Il reste en revanche un point clé à mettre en lumière : la durée de vie du titre. Jeu de plateau oblige, No Retreat! propose un contenu plus limité que les standards du wargame informatique. Combien de fois pensez-vous jouer sur cette carte unique ? Combien de configurations (scénario, camp) êtes-vous prêt à tester avant de vous lasser ? La question est délicate puisqu’il se peut que vous enchaîniez les parties avec des amis, comme il se peut que vous vous lassiez au bout d’une poignée de scénarios ou d’une campagne.

Faute de pouvoir battre en retraite, je botte en touche

Me voilà donc bien embêté. D’un côté, No Retreat! The Russian Front est un excellent wargame. Un titre intéressant pour les joueurs confirmés, qui s’ouvre d’autant plus aux débutants grâce à l’automatisation des règles. De l’autre, ses pépins techniques actuels et son contenu limité se posent en freins légitimes. De là découle un simple conseil de ma part : si le budget n’est pas un souci pour vous, récompenser le développeur des 25€ demandés participera à la croissance du wargame (et ouvrira, qui sait, la porte à d’autres adaptations). Sinon il reste peut être plus judicieux d’attendre la fin de l’accès anticipé ou une promotion.

Page steam du jeu | Tarif : 24.99€

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